lundi 15 septembre 2014

Marécage politique...du jamais vu sous la Vème République

Marécage politique...du jamais vu sous la Vème République

La situation actuelle, du point de vue politique, est un tournant.
Jamais, depuis que la Vè Rébublique a été instituée, on a été dans un tel marécage.
Les logiques ultra-libérales conduisent les Etats à des mesures de plus en plus impopulaires alors que des fortunes s'amassent à travers les fonds spéculatifs et le jeu boursier.
Les actionnaires s'emplissent les poches alors que la pauvreté gagne du terrain tous les jours et que les couches moyennes sont de plus en plus étranglées.
Et ce qui caractérise le plus la période actuelle, c'est la prise de conscience, plus ou moins diffuse que nos gouvernants quels qu'ils soient, ne changeront rien à la chose.
La crise n'est plus un événement, c'est l'état actuel de notre société.
Les chiffres brandis par l'Allemagne sont la référence des "spécialistes" et l'Europe suit ses directives.
Nos dirigeants français, du PS à l'UMP souscrivent à ces logiques-là.
Les mensonges des campagnes électorales éclaboussent leur mandat.
Certains  hommes politiques se fourvoient dans des affaires qui font sauter les derniers verrous de la confiance.
Le ver est dans le fruit: les représentations politiques traditionnelles ont déçu et ne captent plus l'intérêt.
Personne ne vibre, à part pour les idées défendues par le Front National chez nous, et par d'autres sensibilités proches en Europe.
S'y rajoute des médias "aux ordres" dont le rôle éducatif est oublié depuis longtemps.
S'ensuit un manque de perspectives, un manque d'enthousiasme, le sentiment que tout cela nous dépasse et qu'on y pourra rien changer.
Le sentiment individualiste domine. Le "chacun pour soi" est à la mode.
La réponse collective considérée comme impossible.
Le système nous a tous "coincé" dans nos logiques personnelles.
Bien sûr, des initiatives ont lieu, des gens plein de ressources et d'idées tentent des choses...
Mais le ciment commun de la transformation politique se cherche encore...
Des partis à la marge s'opposent plus nettement au système, mais n'attirent pas beaucoup de voix...
Je ne parle pas de la scène internationale où la misère humaine et écologique domine: à Gaza, le dérèglement climatique, la fièvre Ebola, les postures américaines et celles de leurs affidés dont nous faisons partie, les ripostes odieuses des extrémistes utilisant la toile pour choquer, etc...
Comme le dit Serge Halimi, peut-être faut-il savoir se poser et prendre les problèmes les uns après les autres, car dans chacun de ces drames immenses, il y a des responsabilités, des analyses historiques qui méritent qu'on s'y attarde, des pistes de solutions et que, dans ce cas, il vaut mieux avoir de saines lectures que d'écouter les chaînes d'information en continue, véritables machines à ramollir les cerveaux...
Alors que faire?
Il y a le terrain local où la citoyenneté doit reprendre la main, interpeller les "politiques", se ré-approprier le débat, pousser à une nouvelle Constituante pour redéfinir les règles du jeu.
Libérer la parole, donner du temps à l'action, ne pas se faire plaisir dans des éclats, mais travailler dans la durée.
C'est dur et compliqué quand on sait que, malgré l'analyse critique du système électoral, nos vies sont rythmées par les élections.
Quand on voit la quantité et la richesse des acteurs présents à la foire "bio" d'Aurillac, on se dit qu'il y a un enjeu à essayer de transformer toutes ces énergies en véritable coefficient politique, et que l'urgence c'est celle-là plutôt que de garder chacun sa petite identité.
Mais le chemin est long et chaque humain qui compose ces forces est une complexité chargé d'histoires et de vécus.
Nous sombrons aussi parce que nous n'avons plus beaucoup d'intellectuels capables de nous transcender.
Il nous reste Edgar Morin, Noam Chomsky et quelques autres...
Mais il nous manque des Bourdieu, des Camus... la liste est longue...
Chez les hommes politiques, le vide est abyssal.
La référence à Jaurès illustre bien à quel point nous sommes orphelins.
Il faut se tourner vers l'Amérique Latine pour y trouver des acteurs politiques courageux.
Les années 60-70 ont généré Guevara, Lumumba, Cabral, Ho Chi Minh... aujourd’hui nous en sommes loin...
Pour reparler de la France, l'emploi s'éteint, le chômage s'intensifie, on nous rabat les oreilles d'une perspective de croissance qui n'arrive pas et qui pose un grand problème dans un monde où les ressources s'épuisent...
Et que va t-on faire aux prochaines élections dans un pays où la classe politique s'est discréditée?
Prolonger notre confiance, en qui nous concerne, au PS? Bien sûr que non, mais le problème ne se posera pas. Il sera laminé.
Les autres français redonneront leur confiance à un Juppé ou un Sarkozy, qui décevront au profit 5 ans plus tard d'un Valls ou d'un Montebourg?
Et la roue tournera toujours dans le même sens, les logiques du profit continuant de broyer les plus pauvres...
Non, la seule espérance, c'est la redéfinition totale par une Constituante populaire, des règles du jeu, avec un mandat à 5 ans qu'il faut supprimer, un contrôle démocratique qu'il faut exercer à tous les étages de la vie publique, un renversement complet de nos alliances, sortir de l'OTAN comme le propose Régis Debray, s'employer à une transition économique (ndlr : écologique aussi !?) et sociale, redéfinir un paradigme où les rapports humains ne sont pas tournés uniquement vers l'argent, s'inspirer d'autres modèles (l'Islande par exemple, les répartitions de richesse au Venezuela...) et réfléchir aux territoires autrement en ne priorisant plus les métropoles...
De ce point de vue, il nous faut un électro-choc. Pour nous ressaisir, nous obliger à nous rencontrer et à construire ensemble d'autres modèles pour échapper au naufrage..
Le temps n'est peut-être pas si loin, quand on voit la poussée du FN...

René Burle, président d'AVEC15 (14/09/2014)