En 2013, d’après les budgets primitifs, quand le Conseil régional d’Auvergne dépensait globalement 489€ par habitant, Rhône Alpes en dépensait 386€. Quand notre collectivité injectait 39€ par habitant dans l’économie, la région Rhône-Alpes prévoyait 26€. Pour les transports, près de 92€ pour notre collectivité contre 50€ environ pour Rhône-Alpes. Pour l’enseignement, 115€ en Auvergne contre 100 en Rhône-Alpes. Enfin pour la formation professionnelle et l’apprentissage, 81€ en Auvergne contre 76€ chez nos voisins.
Sans tirer de conclusions hâtives sur ces chiffres, les Auvergnats sont en droit de se poser la question de l’intérêt d’une telle fusion avec Rhône-Alpes, « une fusion par défaut » selon les propres mots de R. Souchon, et de se demander comment seront fixées les priorités et si un nivellement par le haut ou par le bas dans les dépenses interviendra en cas de fusion.
Les Auvergnats sont en droit de se demander si l’on ne va pas assister au mariage de la carpe et du lapin et quelle sera la place de l’Auvergne, son influence dans cette nouvelle région mastodonte de plus de 7 millions d’habitants.
Les territoires ruraux sont en droit de s’inquiéter pour leur représentativité et pour la satisfaction de leurs besoins de proximité.Que pèseront nos 3 futurs élus du Cantal et nos 4 élus de Haute-Loire par exemple face aux 34 élus du Rhône et de la Métropole ? Que pèseront les élus des territoires à faible densité face à l’écrasante majorité des élus des territoires urbains ? Pas grand-chose, et encore moins si aucune péréquation n’est instaurée.
Nos concitoyens sont aussi en droit de se questionner sur le recul que peut comporter cette réforme pour la démocratie. Diminuer le nombre d’élus est déjà quelque chose de discutable, et ça l’est encore plus lorsque l’on n’a pas le courage d’acter la proportionnelle et le suffrage universel direct avec une prime majoritaire faible pour toutes les élections, y compris les intercommunalités et les métropoles. Et là le compte n’y est pas avec cette réforme.
Pour conclure, qu’on se le dise franchement, l’enjeu central réside avant tout dans la coopération des territoires.
Or, force est de constater que cette coopération n’est pas toujours à l’ordre du jour, en tout cas qu’elle est perfectible. En matière ferroviaire en particulier où de nombreuses menaces pèsent sur les lignes interrégionales, entre l’Auvergne et Rhône-Alpes notamment.
Sur la ligne Clermont-Fd /Thiers / Saint-Etienne, la coopération des 2 régions pour sauver cette ligne, pour peser dans les négociations avec l’Etat, ressemblait davantage, jusqu’à l’annonce de la réforme, à un jeu de poker menteur entre les 2 Présidents de Région.
Nous le déplorons, comme nous déplorons la suspension de la liaison ferroviaire directe entre Clermont-Fd, Limoges, Brive et Bordeaux faute d’avoir su apporter entre les différents partenaires les 7 millions d’euros nécessaires pour rénover seulement 22 km de ligne entre Laqueuille et Eygurande, soit 10% seulement du kilométrage total de la ligne Clermont-Fd –Limoges.
Or 7 millions d’euros qu’est-ce que c’est finalement ? Cela représente le coût de la construction de quelques centaines de mètres d’une autoroute…
Ainsi, à contre-courant des enjeux environnementaux, de l’aménagement durable et équilibré des territoires, cette fermeture est inacceptable à plus d’un titre.
  • Elle rendra les Auvergnats et les Limousins encore plus dépendants de la route et de l’énergie pétrolière
  • Elle est synonyme de gaspillage d’argent public puisqu’elle fait perdre une partie du bénéfice des efforts conséquents entrepris entre 2007 et 2013 par les deux Régions, RFF et l’Etat pour rénover l’axe Clermont-Limoges : la ligne Ussel-Limoges a par exemple été rénovée du côté du Limousin, tandis qu’en Auvergne d’importants travaux ont été effectués entre Volvic et Laqueuille, puis entre Volvic et Clermont-Ferrand.
  • Elle est le résultat d’orientations nationales exaspérantes et anachroniques en matière de transports dont le service public ferroviaire paie les pots cassés. La dernière en date est l’ersatz d’écotaxe poids lourds à l’assiette extrêmement réduite.
  • Elle est enfin le fruit d’un manque évident de volonté politique en Région Auvergne car sur les 7 millions d’euros nécessaires pour sauver cette ligne, la Région Auvergne n’en n’aurait payé qu’une partie : le Limousin s’était engagé à mettre la main à la poche, tandis qu’une mobilisation de tous les élus régionaux d’Auvergne, une bataille du rail comme diraient certains que nous n’avons pas vu à la manifestation à Merlines il y a 10 jours, aurait pu permettre d’exiger des financements de l’Etat et de RFF.
Monsieur le Président, vous allez nous rétorquer que notre collectivité n’avait pas les moyens de sauver cette ligne, que ce n’est pas de sa compétence, et pourtant, aujourd’hui vous nous proposerez bien de sortir 500 000€ de notre chapeau, en subvention qui plus est, auxquels il faut ajouter 1,4 million d’euros de fonds européens, pour venir en aide à Ecotitanium, appartenant au groupe ERAMET. C’est illogique.
Si le projet de l’entreprise et sa localisation sont intéressants, permettez-moi de vous rappeler que le groupe ERAMET, c’est, d’après les rapports annuels du Groupe :
  • Une trésorerie très largement positive entre 2008 et 2012 : +448M€ en 2012, + 1,1MM€ en 2011, + 1,3MM€ en 2010
  • « un niveau de liquidité très important et une situation financière solide » à la fin mars 2014
  • ERAMET c’est enfin plus d’1 milliard d’euros versés à ses actionnaires entre 2008 et 2013
Malgré cela, l’entreprise vient taper à notre porte. Elle exige une subvention, refuse une avance remboursable et de revoir son plan de financement en prétextant que son projet, d’un montant de 23,5M€, tomberait à l’eau sans la subvention de la Région. Mais de qui se moque-t-on ? Nous ne pouvons cautionner un tel chantage. Ne comptez pas sur nous pour accepter de jeter 500k€ par les fenêtres, d’autant plus lorsque cette aide n’est conditionnée à rien du tout, ou presque.
Ce projet n’a pas besoin d’être aidé par la Région et par des fonds publics. Le Groupe ERAMET a les moyens de le réaliser seul. Il se réalisera avec ou sans nous.
Merci de votre attention.